Les effractions pour porter secours

11/03/2017
Législation

Parlons de situations qui risquent de se présenter n’importe quand, n’importe où, en et hors conditions climatiques particulières.

Nous allons aborder les fameuses « ouvertures de portes » et surtout la notion d’effraction d’un domicile ou d’un lieu privé lorsqu’il s’agit de porter secours.

Rappelons déjà que la notion de lieu privé est fondamentale et que le Code pénal protège la propriété. L’article 226-4 du Code pénal puni de 1 an de prison et de 15 000 euros d’amende le fait de s’introduire ou de se maintenir dans un lieu privé à l’aide de manœuvres, violence, contrainte ou voie de fait.

Alors dans quels cas peut-on enfoncer les moyens d’ouvertures d’un lieu privé ? (Porte, fenêtre, baie, etc..).

Dans un premier temps tordons le cou à des idées reçues, l’ouverture de porte n’est pas une mission exclusive des sapeurs-pompiers, tout citoyen quel qu’il soit, notamment ambulancier, a devoir de mettre tout en œuvre pour porter secours tant qu’il ne se met pas en péril. “…[ ]…Sera puni des mêmes peines quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours” (Article 223-6 du code pénal)

En effet, c’est l’article 122-7 du Code pénal qui prévoit que n’est pas responsable pénalement la personne qui face à un danger immédiat pour lui-même ou autrui (en l’occurrence la victime), accomplit un acte proportionné à la sauvegarde de la personne.

On parle bien d’acte proportionné, il ne s’agit donc pas par exemple, d’abattre la façade d’une maison à coups de pelleteuse qui se trouvait sur le chantier d’à coté, pour une personne ne répondant pas aux appels. Tout est dans la logique de la situation, il faut donc qu’il y ait menace supposée pour la personne.

  • Soit des appels au secours de l’intérieur du domicile.
  • Soit une menace pour la personne (menace de suicide).
  • Tout autre situation qui laisse présager un franc risque.

Exemple : Vous arrivez sur un SAMU et constatez que la personne ne répond pas, vous faites le tour de la maison et voyez par une fenêtre fermée, que la dame gît au sol inanimée. Ce cas-là vous autorise à fracturer la fenêtre pour porter secours, ou la porte, etc…..

Autre cas Madame X est consciente, derrière la porte, et est sur le point d’avaler une quantité de médicaments, elle les a à la main ===> fracture du moyen d’ouverture.

Vous arrivez chez Monsieur Y, qui hurle au secours de l’intérieur, il est enfermé ==> fracture.

Etc, etc….

Il existe toutefois des cas précis plus complexes :

Madame X a appelé des secours, elle se tient derrière la porte, vous répond, mais refuse d’ouvrir, prétexte que tout va bien et semble avoir un discours cohérent, par défaut : pas de fracture de porte et rapport au SAMU.

Chaque situation est à étudier au cas par cas, en tenant compte du fait que vous avez le droit de le faire, tout en restant dans des mesures proportionnées.

Exemple : Casser une porte ET une fenêtre ne sera pas considéré comme proportionné puisqu’une effraction suffit à permettre l’entrée dans les lieux pour porter secours. Enfin, l’article 122-4 du Code pénal renforce cette notion de nécessiter de porter secours orsque cette disposition est prescrite par une directive légale ou réglementaire ainsi que, lorsque cet acte est ordonné par une autorité légitime (pour nous, le SAMU).

Donc, l’ambulancier a doublement le droit de procéder à l’ouverture d’un lieu privé lorsque la situation le nécessite.

Une question revient très fréquemment, y a-t-il besoin de la présence des forces de l’ordre et/ou des SP ?

Légalement aucun texte n’oblige leur présence à aucun moment pour procéder à la fracture d’un lieu privé afin de porter secours, les sapeurs pompiers disposent souvent en revanche, de moyens plus adaptés.

En revanche la présence des Forces de l’ordre sera hautement recommandé pour procéder à la constatation et à la fermeture du lieu lorsque vous partirez sur le CH.

Qui indemnise ?

Dans tous les cas, les assurances professionnelles (Article L122-3 du code des assurances)

ATTENTION A LA PRUDENCE :

N’oubliez JAMAIS que, lorsque vous forcez un domicile pour porter secours, selon l’état ou la réaction de la victime présumée et/ou du propriétaire des lieux, des évènements dramatiques peuvent se produire.

Lorsque vous pénétrez dans un domicile ANNONCEZ VOUS A TRÈS HAUTE VOIX. Pas question de se contenter d’un maigre “il y a quelqu’un ?”, préférez le “MONSIEUR/MADAME X ??!!! C’EST LES SECOURS IL Y A QUELQU’UN VOUS NOUS ENTENDEZ ?” etc etc Frappez les portes, les murs et allumez les lumières en grand.

N’oubliez pas que si le propriétaire des lieux vous prend pour un cambrioleur…..

Il y a quelques années dans l’Ain, les SP interviennent sur la commune de Belley pour personne ne répondant pas aux appels. Le monsieur d’un certain âge ne les entend pas, il fait nuit et ne voit que les lampes torches sous la porte de sa chambre… il pense être victime d’un cambriolage, est pris d’une crise de panique et ouvre le feu au fusil, abattant un des sapeurs-pompiers. L’homme sourd n’ayant pu entendre les SP qui s’annonçaient, a été innocenté par la justice.

Même si ce genre d’évènement reste rare, il a le mérite d’exister, il ne doit pas vous inciter à la peur et au refus de faire votre travail convenablement en fracturant pour porter secours, mais de vous rappeler d’être prudent.

L’équipe du CATSUF

Vous pourriez également aimer...

Laisser un commentaire