
Tout d’abord l’article L1110-4 du code de la santé publique dit ceci : « Deux ou plusieurs professionnels de santé peuvent toutefois échanger des informations relatives à une même personne prise en charge, afin d’assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge sanitaire possible ».
On constate, rien que dans ce passage, que deux professionnels PEUVENT échanger des informations pour la continuité des soins. Le mot “PEUVENT” n’a pas de caractère d’obligation, cependant il contredit à lui tout seul toutes les réponses du type “vous n’avez pas le droit », vous avez bel et bien le droit puisque l’ambulancier diplômé d’état est un professionnel de santé visé à la quatrième partie du code de la santé publique. Donc même s’il n’en constitue, en ce qui concerne ce texte en particulier, pas une obligation.
Couplons ensuite ce droit avec l’article L162-4-1 du code de la sécurité sociale qui OBLIGE tout médecin prescripteur à indiquer sur la PMT les éléments médicaux et/ou pathologique du patient, la PMT recèle donc la pathologie du patient ou du moins les éléments nécessaires à informer les ambulanciers pour le transport.
On continue ? L’article R322-10-2 du code de la sécurité sociale OBLIGE le patient à vous fournir la prescription médicale de transport (patient ou médecin) AVANT le transport.
Donc l’ambulancier dispose bien de la prescription ET des éléments pathologiques avant le transport. Le “PEUVENT” devient “DOIVENT” et contraint le corps médical à informer l’ambulancier.
Il est également indiqué à l’article 121-3 du Code pénal : “Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, DE LA NATURE DE SES MISSIONS OU DE SES FONCTIONS, de SES COMPÉTENCES ainsi que du pouvoir et DES MOYENS DONT IL DISPOSAIT…
Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou QUI N’A PAS PRIS LES MESURES PERMETTANT DE L’ÉVITER…”
En tant qu’ambulancier donc, vous devez mettre tous les moyens en œuvre pour effectuer une prise en charge la plus adaptée et optimisée possible qui soit, tout en étant tenu au secret médical partagé.
Rappelons également qu’en tant que AA ou ADE, votre rôle est aussi de ne pas dégrader l’état du patient. Les informations contenues dans la lettre du médecin peuvent vous aider à déterminer la prise en charge optimale dans ce but précis également.
Cette lettre peut donc être ouverte SI, la PMT est vide ou aucune information d’ordre médicales ne vous est fournies, car vous tombez sous l’obligation prévue par l’article 121-3 du code pénal.
Enfin, si vous avez encore des réticences à ouvrir la lettre du médecin, je vous laisse imaginer la pire situation qui soit (certes extrême) mais rappelez-vous que ça n’arrive pas qu’aux autres:
– Vous intervenez à domicile, le médecin généraliste est passé et a laissé un courrier. Personne pour vous accueillir si ce n’est le patient. Il vous dit “le médecin a dit d’aller à l’hôpital pour mon appendicite”. Tirons un scénario apocalyptique mais tout à fait crédible : Vous faites votre bilan au 15 avec les données que vous possédez, sans ouvrir le courrier. Vous prenez en charge votre patient, vous le déposer aux urgences et vous rentrez à votre bureau puis chez vous. Manque de chance, le patient avait une BMR, vous avez souillé les urgences, votre véhicule, le bureau de votre entreprise, ainsi que votre véhicule personnel et votre domicile. Votre petit dernier de 2 mois contracte la BMR vous l’enterrez 6 mois plus tard en même temps que la fille de 5 ans de votre régulateur chez qui vous aviez pris l’apéritif le soir, ainsi que le nourrisson de votre voisine, qui est venue prendre le café et qui aura oublié de se laver les mains…
Alors bien évidemment on imagine le pire dans cette situation digne d’Ebola… mais elle est totalement crédible, sans compter les cas où c’est le patient qui sera mis en danger par manque d’informations. Un an plus tard vous êtes jugés pour homicide involontaire par négligence et mise en danger de la vie d’autrui.
Conclusion : Même si certains vous disent le contraire, pensez à vos patients, à vos enfants, à ceux de votre entourage et à vos proches, ouvrez donc n’importe quel courrier si vous ne disposez pas des informations requises, C’EST LA LOI.